Les années 1960 : le reflex 24 x 36 à l'assaut du marché.
Le Savoyflex III Automatic : à l'ombre des grands

Monsieur Royer, avant d'être réduit à n'être plus qu'un importateur photo parmi d'autres, avait de grandes ambitions. À vrai dire justifiées. En effet, au cours des années 50, il produisit une déclinaison de compacts à obturateur central, certes d'amateur et à objectif fixe, mais de belle qualité: les Savoya, à armement par bouton moleté, Savoy II à levier, IIc doté en plus d'un posemètre sélénium non automatique et III à viseur collimaté.

Cependant, dès les années 1950, chacun n'avait d'yeux que pour les reflex. Les constructeurs les plus audacieux s'étaient lancés dans les modèles à rideaux, et la plupart des grands systèmes reflex 24 x 36 qui dominèrent les décennies suivantes naquirent entre 1953 et 1959. D'autres, auxquels l'histoire donna tort avec ou sans fortune faite, furent tentés par l'obturation centrale, et M. Royer fut de ceux-là. Il n'inventait certes pas, ou plutôt pas beaucoup. Avant lui ou en même temps, Zeiss (Contaflex), Voigtländer (Bessamatic), Kodak (Retina Reflex) et Foca (Focaflex) furent aussi tentés par l'offre des obturateur reflex mis au point par Compur et Prontor. ceux-ci donnaient toutes vitesses de 1s au 1/500s avec synchronisation pour l'éclair électronique à toutes les vitesses aussi. Rappelons que l'obturation centrale sur un reflex direct n'est qu'en apparence une solution de facilité. En effet, alors qu'un obturateur ordinaire s'ouvre puis se referme une fois la photo faite, un obturateur central reflex accomplit un cycle nettement plus compliqué, coordonné avec un obturateur secondaire et avec le mouvement du miroir ainsi que du présélecteur de diaphragme. Cet obturateur doit autoriser la visée, et de ce fait il doit rester ouvert par défaut. Le cycle est donc le suivant: l'oburateur se referme, le diaphragme se referme à la valeur de travail, le miroir remonte, l'obturateur s'ouvre puis se referme. Et, en principe, tout rentre dans l'ordre (on ne disait pas encore à l'époque réinitialiser) seulement lorsqu'on réarme l'appareil. Donc, une fois la photo prise, plus de visée!

Mais, je vous le disais, M. Royer était un homme ambitieux. Car sur ses Savoyflex, le miroir, comme sur un reflex à rideaux, redescend une fois la photo faite, et pour que cela serve à quelque chose il fallait que l'obturateur s'ouvre et le diaphragme aussi… vaste programme dont à vrai dire l'appareil s'acquittait si honorablement qu'au moins trente ans plus tard certains étaient encore en état de marche moyennant quelques petites révisions! La conception était beaucoup moins avant-gardiste que celle des Focaflex, eux aussi à obturation centrale, mais la fiabilité nettement supérieure!

Le Savoyflex I, le plus simple, était sans cellule et ses vitesses limitées au 1/300s; son objectif Berthiot 2,8/50 faisait le point par translation de la lentille frontale. Le Savoyflex II en différait par une mise au point sur hélicoïdale. Le III Automatic, illustré ici, montait au 1/500s, sa mise au point descendait à 35 cm sans accessoire et à 20 cm avec bonnette, et il recevait des blocs optiques optionnels Berthiot Hyperflex 2,8/35 et Ampliflex 4/80. Il était doté d'une cellule sélénium frontale lui conférant l'automatisme (débrayable) à priorité de la vitesse. Ce sont des appareils pleinement utilisables encore de nos jours, surtout lorsqu'on s'en sert avec grand soin. Malheureusement, comme pour bien des appareils de ce type, les compléments optiques sont extrèmement difficiles à trouver.